Comme je l’indiquais récemment, je déménage en Normandie. Et bien sûr, les arts martiaux faisant partie intégrante de mon quotidien, cela implique la pratique du Shindo Yoshin ryu, un jujutsu traditionnel, dans le bocage normand (lire : Shindo yoshin ryu en Normandie). Entre cours et construction d’un nouveau dojo, mes projets ne manquent pas, un nouveau cycle s’enclenche, renouvelant le précédent.
J’ai souvent déménagé, malgré une grande stabilité remarquable ces dix dernières années. Aujourd’hui, je me retrouve à nouveau à jongler avec les cartons et le démontage de meubles. Mais cette occurrence a un parfum différent : je dois vider mon dojo, lui laisser sa destination originale, en refaire un garage.
C’est un sentiment spécial, ce dojo ayant été formellement ouvert (rite shintoïste réalisé par sensei Threadgill) et étant passé d’un groupe d’étude, au premier dojo français officiel de Shindo Yoshin ryu depuis que sensei Threadgill est le Kaicho de l’école.
Je retire les armes des râteliers, trop nombreuses pour mon utilité quotidienne, mais ô combien nécessaires pour les deux stages publics que nous avons pu organiser à Osny. Les ema décoratifs (car ils devraient passer par le feu, une fois les voeux inscrits) me rappellent des souvenirs du Japon; et surtout, le retrait du kamidana contenant les O-fuda des kami tutélaires de l’école, marque pour moi le vrai arrêt de la pratique en ce lieu.
Si les objets ne sont que des constructions inanimées de l’Homme, ils ne restent pas moins associés à des souvenirs nombreux sur ces 8 années. Le dojo a vu passé de nombreux curieux de toute origine martiale : karaté, judo, aikido, kendo, ninjutsu, shorinji kempo, etc… J’ai eu mon lot de pratiquants plus dans le test et le rapport de force, parfois aussi des samouraïs en herbe. Sont restés ces élèves à qui le Shindo Yoshin ryu et la pratique des ryu-ha, faisait raisonner en eux quelque chose qu’une simple activité physique ne pouvait pas.
Il y eut aussi tous ces gasshuku, invitant Marco Pinto de la lointaine péninsule ibérique pour entrainer des pratiquants venus des 4 coins de l’Europe. De souvenir, sur 13 tatamis, nous avons déjà réunis plus de 10 nationalités différentes pendant 12h d’entrainement le weekend. Je remercie les pratiquants pour tout le temps passé à progresser ensemble et maintenir notre tradition vivante. Nombre d’entre eux se souviendront aussi d’une autre tradition locale, les gâteaux de ma femme, et les discussions arrosées jusqu’au petit matin.
Ce matin, je laissais donc l’empreinte du kamidana sur le bois du mur me transporter vers tous ces souvenirs. Le dojo était redevenu un garage. Et tout le vide de la pièce appelait à raviver ces kiai, cette sueur, et cette énergie d’un instant. La calligraphie « Ichi go, ichi e », offerte par une amie, ne pend plus au mur. Sagement enroulée et rangée dans un carton, elle attend de ressortir dans l’air normand et porter son message : « un instant, une rencontre ».
Effectivement, un cycle se termine, un autre commence, et avec ce changement, se crée la rencontre d’une koryu – quintessence de la tradition japonaise – avec une terre de tradition, la Normandie. Ichi go, Ichi e : un instant, une rencontre; comme une occasion unique.
Dans le bocage normand, à la limite entre l’Orne et le Calvados, au coeur du pays d’auge, de ses fromages et ses breuvages, c’est donc une école qui proposera aux personnes curieuses, de découvrir une école de jujutsu de 1864. A peine plus ancienne que les pierres de mon nouvel habitat (1866).
Le changement est radical. Finie la densité péri-urbaine de l’Ile de France, où la vie même de la cité transforme la pratique : pas assez de temps, trop de transports, il faut tout faire vite, voire rentabiliser sa consommation temporelle. Pour une tradition martiale, il faut pouvoir s’imprégner avec le temps, et approfondir la richesse de la pratique sans objectif à court terme (le changement d’usage du corps nécessite temps, répétition et enseignement clair).
En refermant la porte du garage-dojo, je vois à nouveau cet emplacement de terre battue où je fis bâtir le Tesshinkan. En Normandie, la porte d’un de mes ateliers, m’invite au même projet : y bâtir le nouveau Tesshinkan, un dojo traditionnel japonais au pays d’Auge. En attendant la réalisation de ce projet, j’enseignerais en différents lieux dès la rentrée, le keikogi et le hakama n’auront pas le temps de prendre la poussière
Pour me contacter, avoir des renseignements sur le Shindo yoshin ryu ou les entrainements en Normandie : n.dela@free.fr ou sur facebook : https://www.facebook.com/Tesshinkan/
Etant installé depuis longtemps en Normandie je vous souhaite le meilleur pour vous votre famille et vos projets. Nous aurons surement le plaisir de nous y voir et partager notre façon de vivre à la recherche de la technique des KORYU. Cordialement. Christian DARRICARERE.