Le do (道) est une notion commune à tous les arts martiaux japonais (et chinois par le tao…). Explicitement mis en avant par les budo – voies martiales, il représente le cheminement du pratiquant pour atteindre son hypothétique objectif.
Ce développement de la personne par le chemin qu’il parcourt rejoint à mes yeux – tout au moins en partie – le but humaniste de l’école. Il ne s’agit pas simplement de façonner des élèves prêts opérationnellement pour le marché du travail avec un beau diplôme ronflant mais de préparer la personne à appréhender les différents aspects de la vie en développant son propre potentiel. Ce but, plus large que la formation opérationnelle ciblée, repose sur les expériences acquises lors du cheminement vers cet idéal. Mais il y a bien des moyens de s’égarer en chemin.
Lors de conversation entre parents d’élève, je fus pour le moins estomaqué par l’aplomb d’une maman qui disait organiser la tricherie de sa progéniture. Certes elle lui faisait répéter ses leçons mais lui préparait des anti-sèches et des brouillons à ressortir pendant l’interrogation en classe pour être sûr d’obtenir une bonne note. Sa justification, comme un slogan sorti d’un film – mais bien plus un reflet du besoin de réussite sociale, était qu’elle « ferait tout pour son fils ». Ai-je besoin de préciser comment ce comportement est l’exact opposé de ce qu’a besoin son enfant ? Je ne parle même pas de valeur véhiculée (la fin justifie les moyens, mentir/tricher n’est pas un problème) ou encore de l’injustice par rapport à ses propres camarades et de l’effet délétère sur leurs propres efforts… Comment peut-on apprendre la valeur du chemin, et acquérir ce que son parcours apporte d’expérience si nous ne prenons que des raccourcis artificiels ? Rien. Le développement de la personne auquel nous invitent les budo est juste escamoté sous un vernis donnant l’aspect du résultat.
Malheureusement parfois, le pratiquant se laisse ainsi leurrer par son objectif : il mime son idole, acquiert tous les ustensiles et habits qui lui permettront de mieux coller à cette image, reprendra le discours idoine… Mais au final, au fond de lui il manquera quelque chose. Il lui manquera cette transpiration laissée sur le tatami à répéter, échouer, ré-essayer, affiner et recommencer, ce sang qui parfois tâche son gi, ces blessures qu’il aurait aimé éviter mais qui sont arrivées et lui ont quand même appris quelque chose sur lui et/ou sa manière de faire; ces larmes de frustration lorsque décidément, non il n’y arrivera jamais… Et qu’il essaie encore; ces quelques instants éphémères où tout est passé comme miraculeusement (ichi-go, ichi-e / Un instant, une rencontre)… Mais qu’il va falloir arriver à reproduire inlassablement.
Celui qui arpente le Do – qu’il soit doué ou pas, grand/petit, gros/maigre… – ne manquera pas de réfléchir sur sa pratique, pour se dire que plus il avance, plus le chemin se déploie devant lui et qu’en y consacrant la durée de sa vie, il pourra faire quelques pas de plus dessus et en découvrir les richesses. Et il retournera à cette passionnante tache.
Bon keiko à toutes et à tous !
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