Invité par un professeur d’Aikido à participer à un cours sur le Kodokan goshin jutsu, j’ai revêtu mon plus beau judogi ce samedi et délaissé mon hakama. Voici donc l’occasion de parler du kodokan goshin jutsu… Mais goshin jutsu et aikido, kesako ?
Le Kodokan goshin jutsu est un kata de selfdefense du judo kodokan établi en 1956 par un groupe d’experts. Dernier kata créé, il a la particularité d’avoir reçu l’influence de Kenji Tomiki, 8e Dan de judo et 8e Dan d’Aikido (élève direct de Moreihei Ueshiba).

Kenji Tomiki, 8e dan d’aikido, 8e dan de judo et fondateur du style d’aikido Shodokan. Copyright Aikidojournal.
Kenji Tomiki (1900-1979), débute l’Aikido auprès d’Ueshiba sensei en 1926 et commença le judo en 1928. Il enseigna l’Aikibudo (un des premiers noms de l’Aikido, différent de l’Aikibudo français), en Mandchourie de 1936 jusqu’à la fin de la guerre. Il reçut le 8e Dan d’Aikido en 1940 et le 8e Dan de judo en 1970. Fortement imprégné de la méthode Kano et de l’intérêt du randori libre, il voulut moderniser l’Aikido, il créa en ce sens son dojo pour expérimenter la compétition en Aikido : le shodokan dojo. L’Aikido du style Tomiki est à ce jour un des rares styles qui incorporent la compétition dans son cursus.
Dans le cadre du judo, il est connu pour avoir participé à l’élaboration du kata du goshin jutsu et publié ses travaux dans le livre « Judo » en 1956. Il est alors professeur de judo à l’université de Waseda et 7e Dan de judo.
Le Kodokan Goshin jutsu est donc une « mise à jour » moderne d’ancien kata orientés self-defense de l’école Kodokan (judo). Il est composé d’un ensemble de séquences où Tori, toujours à mains nues, doit faire face à des attaques au contact (saisies, étranglement, …), des attaques à distance (coups de poing / pied), et quelques attaques aux armes (bâton et pistolet).

Exemple de séquence sur saisie (copyright judu info. http://judoinfo.com/katagosh.htm)
Il faut savoir que dans les années 30, alors que le judo est déjà bien implanté au Japon et a vu une croissance impressionnante, Jigoro Kano (qui mourra en 1938), est insatisfait de la direction que prend le judo; il y voit de mauvaises positions et habitudes dues à la compétition ou au randori sportif et veut donner des cours spéciaux de randori, pour revenir à une pratique plus proche de l’esprit des premiers randori (lire à ce sujet : Judo’s techniques performed from a distance). De plus, il essaya d’intégrer dans son judo des techniques à distance plus longue (voire précédent lien), des atemi (notamment en encourageant Tomiki à intégrer l’Aikibudo/Aikido) voire des techniques de sabre (lire A judo that incorporates kendo). Le goshin no kata, avec un contexte de self defense, semble renfermer ces autres distances de travail que le seul corps à corps. Les aikidoka y retrouveront aussi le taisabaki.
Un point intéressant vis à vis du Kodokan goshin jutsu est qu’il est toujours demandé aux passages de grade du judo mais qu’il sert aussi de base dans un certain nombre de gendai jujutsu (jujutsu moderne, voir le texte : qu’est-ce que le jujutsu ?), comme le jujutsu (orthographié jujitsu) de la fédération française de judo, base de judo à laquelle d’autres influences sont venues se mêler (notamment pour l’ajout des atemi, avec des synthèses issues d’autres arts tel le karaté) et dont la pratique résultante reste très différente des jujutsu classiques (on peut trouver de nombreuses vidéos sur internet de nos jours, juste en cherchant le nom de ces écoles : quelques écoles de jujutsu).
Les lecteurs anglophone pourront lire avec intérêt l’interview de Tomiki sensei pour l’aikidojournal : http://www.aikidojournal.com/article?articleID=144
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